Les administrations ont la possibilité de recruter des agents qui n’ont pas vocation à occuper un quelconque emploi mais à n’effectuer qu’une tâche ponctuelle. Il s’agit des vacataires. Mais qui sont-ils ? A quoi correspond cette catégorie particulière d’agents publics dont le régime juridique est distinct de celui applicable aux agents contractuels ?
La réponse a cette question n’est pas évidente : en « l’état actuel de la réglementation, aucun texte ne définit la qualité de vacataire. Seule la jurisprudence apporte des précisions » (Rép. min. à la QE n°26505. JOAN (Q.), 23 mars 2004, p.2323). Pour identifier et définir les vacataires, il faut donc se tourner vers la jurisprudence administrative.
Les vacataires : critères d’identification inopérants
Certains critères n’ont pas été jugés pertinents pour qualifier un agent de vacataire.
Le contrat écrit
Dans un arrêt rendu le 28 novembre 2003, le Conseil d’État a rappelé que l’absence de contrat écrit ne peut suffire à qualifier un agent de vacataire (CE, 28 novembre 2003, AP-HP, n°236510).
Toujours concernant le contrat de travail, la mention de la qualité de vacataire dans l’acte d’engagement ne suffit pas non plus à emporter la qualification du contrat, comme l’a rappelé le Conseil d’État dès 1982 (CE, 10 novembre 1982, n°21628).
Ainsi, les juges ont considéré que la forme du contrat ou même son absence ne pouvait suffire à qualifier un agent de vacataire. Ce faisant, les juges ont entendu écarter tout critère formel de cette qualification.
La nature des tâches confiées à l’agent
Concernant cette fois la nature des tâches confiées, ni l’absence de soumission hiérarchique directe ni la liberté d’organisation du travail n’ont été retenus comme des critères d’identification pertinents (en ce sens : CE, 26 mars 2003, Syndicat national CGT de l’INSEE, n°230011. AJDA, 2003, p. 1115, note G. Le Chatelier).
Les vacataires : critères d’identification opérants
Il convient désormais de s’attarder sur les critères jugés pertinents pour identifier les vacataires.
Les trois critères cumulatifs d’identification mis en œuvre par la jurisprudence découlent de l’analyse du besoin de l’administration à l’origine du recrutement d’un vacataire : ce besoin doit être différent celui qui conduirait à la création d’un emploi – qu’il soit permanent ou non.
L’accomplissement d’un acte déterminé
Le recrutement pour accomplir un acte déterminé est le premier critère jurisprudentiel permettant d’identifier un vacataire.
Comme nous l’avons déjà précisé, le vacataire n’est pas recruté sur un emploi – que celui-ci soit permanent ou non. S’il était recruté pour un ensemble de tâches, pour une mission qui le conduirait à effectuer plusieurs tâches distinctes, il serait alors recruté afin de pourvoir un emploi ; il ne serait donc pas vacataire.
Si cette observation paraît relever de la plus pure évidence, il convient toutefois de noter qu’en pratique, la distinction entre une mission relevant d’un emploi et un acte déterminé est parfois ténue. C’est la raison pour laquelle il convient d’examiner en détail l’appréciation jurisprudentielle de ce critère. Certains exemples pris en référence ne présentent que des difficultés modérées. Ainsi, un pigiste recruté par une collectivité pour rédiger plusieurs articles est reconnu comme étant un vacataire, même si cette collaboration a duré pendant une année entière et a donné lieu à la rédaction de nombreux articles (TA Amiens, 25 février 2003, n°00180). Il en va de même pour un formateur qui dispense occasionnellement des cours pour le compte du Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT), même si ses interventions ont été nombreuses et successives (CAA Douai, 2 décembre 2003, n°00DA00824).
En réalité, les juges examinent en détail la nature du besoin de l’administration satisfait par ce recrutement. Dès lors, si l’agent a été recruté afin de satisfaire un besoin permanent de la collectivité, il ne peut être qualifié de vacataire (CE, 11 février 2013, Mme Bakhtaoui, n°347145. AJDA, 2013, p. 374, note MC de Monteclerc). La Cour Administrative d’Appel de Bordeaux a ainsi jugé, dans un arrêt en date du 23 juin 2005, que la qualité de vacataire est incompatible avec un recrutement à durée indéterminée, le besoin de l’administration ne pouvant alors n’être que permanent (CAA Bordeaux, 23 juin 2005, n°02BX01107).
La rémunération à l’acte
Le second critère d’identification d’un vacataire est la rémunération à l’acte.
Les vacataires sont – comme nous l’avons déjà précisé – recrutés pour accomplir un acte déterminé. Ils doivent par conséquent fort logiquement être rémunérés sur la base des actes ainsi accomplis. En cela, le mode de calcul de leur rémunération est différent de celui applicable aux autres agents publics, dont le traitement est fixé en fonction du grade et de l’échelon. L’article 20 alinéa 2 du statut général des fonctionnaires précise en effet que « le montant du traitement est fixé en fonction du grade de l’agent et de l’échelon auquel il est parvenu, ou de l’emploi auquel il a été nommé ».
Dès lors, la simple rémunération d’un agent sur les crédits affectés aux vacations ne suffit pas à lui conférer la qualité de vacataire. Ainsi, des médecins agréés réalisant les visites médicales d’embauche, payés à l’acte, sont des vacataires (Rép. min. à la QE n°9180. JOS (Q.), 6 janvier 2005, p. 29). Il n’en va pas de même pour un psychologue employé pendant 16 ans sur la base de 40 à 60 heures mensuelles et rémunéré sur la base de crédits affectés aux vacations (CAA Marseille, 28 février 2006, n°02MA00703).
Le critère de la rémunération à l’acte est par conséquent nécessaire mais pas suffisant pour caractériser un vacataire.
Le caractère discontinu de la relation de travail
Enfin, le dernier des trois critères cumulatifs permettant d’identifier un vacataire tient au caractère discontinu de la relation de travail. C’est notamment par ce critère qu’il est possible de distinguer le recrutement d’un vacataire avec le recrutement d’un agent sur un emploi non permanent.
Ainsi, un agent recruté par arrêtés mensuels successifs ne peut être considéré comme un vacataire (CAA Versailles, 4 octobre 2007, n°05VE01741). Dès lors que le recrutement est continu – même s’il n’est pas quantitativement constant – la qualité de vacataire n’est pas reconnue à l’agent (CAA Paris, 5 décembre 1989, M. Jodelet, n°89PA00958). A contrario, un agent recruté de manière discontinue pour accomplir des tâches déterminées peut être considéré comme étant un vacataire (CAA Marseille, 4 mars 2008, M. B., n°05MA03217).
Les trois critères cumulatifs ainsi mis en place par la jurisprudence permettent de circonscrire précisément les contours de la notion de vacataire.
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Avocat en droit public au Barreau de Lille, Docteur en droit public, Maître Gauthier JAMAIS forme, conseille et défend les administrations, les agents publics, les entrepreneurs et les particuliers. Il intervient dans toute la France métropolitaine, mais aussi dans les territoires et départements d’outre-mer.